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Jangarh Kalam - l’art des Gond

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Jangarh Kalam veut dire à la fois le style et le pinceau de Jangarh. C’est le peintre Akhilesh, qui a donné ce nom à une école de peinture qui s’est créée autour de la figure emblématique de Jangarh Singh Shyam. Jangarh, de son vivant mais plus encore après sa mort prématurée en 2001, est le maître incontesté des artistes Pardhan de la communauté Gond du Madhya Pradesh. À travers cette forme artistique nouvelle et bien distincte, cette communauté tribale indienne a gagné une belle victoire sur l’oblitération annoncée de son héritage séculaire et de sa créativité. L’exposition Jangarh Kalam est un simple témoignage de cet héritage immatériel qui laisse voir de nouvelles perspectives.

Jangarh Singh Shyam
En 1982, le musée Bharat Bhavan, demande au grand artiste Jagdish Swaminathan d’organiser des recherches sur l’art tribal dans l’état du Madhya Pradesh. L’art florissant de ces tribus anciennes, musique, danse, célèbre et vivant dans le passé, a presque disparu. Pourtant, un jour on découvre une maison dont les murs sont couverts de dessins aux couleurs merveilleuses dans le village de Patangarh. C’est l’oeuvre du jeune Jangarh. Swaminathan l’appelle auprès de lui pour travailler au musée et développer ses dons artistiques. Marié à quinze ans, Jangarh s’installe à Bhopal avec sa jeune épouse Nankusia. Sa créativité et l’originalité formelle de ses dessins le rendent vite célèbre. Il est sollicité en Inde et à l’étranger. Il expose au musée tribal Bharat Mahotsav au Japon en 1988, puis à Londres, à Paris au Centre Pompidou pour Magiciens de la Terre en 1989, en Hollande en 1992 et en Australie en 1993. Jangarh se suicide au Japon en 2001 dans de mystérieuses circonstances. D’un caractère ouvert, était-il néanmoins suffisamment préparé aux voyages lointains, à la solitude ? On dit aussi que son passeport lui aurait été retiré…
Deux mondes le pleurent : celui des artistes, celui de sa communauté. À l’âge de trente-huit ans Jangarh Shyam aura su faire renaître la tradition des Pardhan, l’art tribal des Gond. Il aura aussi fait reconnaître un art, son art, au delà des frontières du royaume des Gond et de l’Inde nouvelle.

Jangarh Kalam
Le Jangarh Kalam est devenu le mouvement artistique actuel des Gond. Un mouvement inspiré par l’art de Jangarh et par la musique Pardhan, celle du Bana, reprise et transformée en couleurs et en dessins. Chacun des artistes du mouvement Jangarh Kalam est inspiré par la mythologie éclatante de la tribu et développe également un style propre, symbolisé formellement par une signature pictographique, logotype formé de points et de traits, qui s’inspire souvent des tatouages et des masques rituels. Aujourd’hui grâce à ce mouvement artistique, la mémoire collective et les traditions Gond renaissent. Cet élan sert un mouvement plus global de reconnaissance des formes artistiques tribales en Inde et des populations souvent opprimées ou spoliées.

Retour au Royaume des Gond, des Pardhan et des Dieux
Il y a très longtemps le royaume des Gond, alors prospère, s’étent sur le centre de l’Inde : le Madhya Pradesh, l’Andhra Pradesh, le Chattisgarh et le Maharastra. Cette période prospère dure peut-être 1400 ans. La communauté est relativement égalitaire. On sait qu’il n’y a pas de prison. Le royaume est suffisamment riche pour entretenir ses artistes. Les Pardhan, bardes de la communauté musiciens et chanteurs, sont aussi des prêtres qui permettent à la communauté de rester unie. Ils représentent la mémoire collective Gond en racontant l’histoire du peuple et de ses dieux. Après une très longue période de prospérité le peuple Gond s’appauvrit ; il n’y a plus assez de familles riches pour rémunérer les Pardhan. La tradition se perd avec ses artistes. Dés le règne des Moghols et des Marathes, leur environnement se dégrade. Sous l’empire Britannique et après l’indépendance de l’Inde, la spoliation de leurs terres et la déforestation sont telles que les Gond ne trouvent plus leur arbre bien aimé, le Mahua : « On nous a pris la forêt, nous ne savons plus d’où nous venons », disent les Gond. L’arbre sacré très souvent représenté, est le symbole de cet attachement à leur mémoire et de cette perte.

© Anders Laustsen - Galerie Anders hus


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